colère académique

Publié le 18 Décembre 2011

Colère du confort et du manque de voyages. On se réfugie, on compte, on voudrait dompter, tout tombe, tout reste en chasse, on regrette sa toute petite place, sous l'ombre tout juste suffisante (aujourd'hui qui ne meurt pas à bosser devient très vite suspect). La tente repliée a précipité le verdict, seuls maintenant les voisins brûlent, et ici les vacances ne comptent plus. Mais je découvre cette terrasse chauffée à l'onglée, forte de ce bruit qui parle boulevard, j'ai même presque cru y revoir N. en Miss à béret, j'aurais pu lui redemander, elle souriait. Mais le lieu-dit a brûlé, ce matin, cette histoire me concerne, en enfilade, on ne m 'avait jamais vu ici, je ne porte pas plainte, mais je fais donner une piqûre de rappel, aux verres flous le chauffard s'énerve, il n'y a plus de lumière ici. La tourbe a bien livré ses os fossiles, liberté de la restitution; mais les particules élémentaires nous plient à une  masse, sans qui nous flotterions diffus dans un univers où droite et gauche n'auraient jamais été mêlées, et nous n'aurions pas à réitérer chaque jour ces expériences shadoques à certitude de perte (notre masse abrite sa contingence à l'illusoire de la restitution du tout cristallin et tendre, brillant, duveteux, poussiéreux, où nous aurions toute la perte et toute la connaissance). Le monde ici m'inonde enfin, de tous ces peuples qui tentent la route, de l'espoir qui tend, flou, juste au-dessus du survivre; et ce tremolo là est en moi chaque fois que le lieu porte, les langues s'y délient en une méta-poésie, ceux qui ont gagné sont ceux qui inventeront cette nouvelle langue, aucun tyran ne pourra bientôt plus être pris au sérieux, tous les peuples s'y porteront enfin comme moi je tente, de mon refuge de non-importance, où le docteur qui persiste nu est pourtant toujours maître d'une demande, et donc d'un droit d'étage. Un panoptique de compassion pure, gratuite.

 

 

Nous incarcérons les sans-papiers, une identité nationale est requise pour ne plus voyager. Mais depuis la douleur des frontières nous réhabiliterons la beauté des voyages, ce dépaysement permanent des migrations, ce pas de côté qui tend à l'étrange du soi. Nous allons, tous étranges étrangers, vers la beauté rayonnante de la fin des nations, beauté qui inondera les immensités, seuls quelques uns gesticuleront encore, tentant de conserver une seule direction, grimaçants; le fleuve sera public, et plus uniquement à sa source. Mais pour l'heure je suis juste après l'incendie, et juste avant la glace, comme l'eau est cet organique qui nous flue, comme l'adolescence est ce moment où les possibles cohabitent, en amont et en aval des choix impossibles de l'adulte, douleur encore, seul l'énervé de Jumièges connaît ainsi le fleuve, prêt à jouir du bac imprévu. Je fignole mon personnage taiseux, brouillé avec ce monde au plus prêt du craquer de beauté, toujours présent à cet ineffable du réel qui continue sans se gêner, de la réalité qui se gausse bien de nos guerres. L'effroyable vaut aussi pour l'écriture.

 

 

Diagonale du vide ou région du Grand Mékong, quelques parasites résistent aux injonctions de mort, aux monothérapies des totalitarismes. La méta-poésie tend vers une nouvelle langue encore secrète aux maîtres, et ne pas avoir été maîtrisé de la novlangue des marchands – comme de n'avoir jamais été maître d'aucune parole – fut sans doute la condition, ou la coïncidence, de porter cette vibration là. Les mots se poussent comme des bidons vides à rouler jusqu'à la source.





Rédigé par h. j. g. de la barge

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